Nous avons tous fait des expériences, et nous en faisons encore à chaque instant. Nous apprenons à tous moments et cela augmente notre référentiel existentiel, notre champ de compétences et de capacités, nos aptitudes à comprendre et interagir avec autrui ou simplement dans le monde. J’ai eu envie de laisser libre cours à mes pensées pour ce premier article, et libérer mes associations d’idées, pensées, explications, pour proposer une sorte de définition, certes complètement subjective, de l’apprentissage.

Commençons par illustrer ce propos d’un exemple : apprendre à faire du vélo – même si ce pourrait être nager, ou cuisiner, ou conduire… On expérimente un peu à chaque fois, une fois puis deux puis trois, on essaye de trouver un nouvel équilibre qu’on ne connaissait pas, gérer cette nouvelle posture en contactant tel ou tel muscle, et puis naturellement appuyer sur les pédales, plus ou moins fort, toujours en ajustant ce nouvel équilibre physique et en percevant la sensibilité du guidon qui fait tourner la roue dans une ou l’autre direction. Même si on est aidé par quelqu’un qui « sait déjà », on doit expérimenter par nous-même pour apprendre et pour comprendre . Le corps intervient pour une grande part, ses os, muscles, tendons, et l’esprit observe et ajuste : « tiens là ça fonctionne si je contracte plus tel muscle, ou si je me déporte de tel côté, tiens là ça ne marche pas ! » et hop, on se casse la figure. Et on réessaie, avec aide, sans aide, on prend de l’assurance et on crée une nouvelle habitude.

Il y a 4 stades d’apprentissage :

  • inconsciemment incompétent,
  • consciemment incompétent,
  • consciemment compétent
  • et inconsciemment compétent.

Le premier est celui où on ne sait même pas de qui ça parle, ni comment on fait, faire quoi au juste ? C’est le bébé avant 6 mois qui ne comprend même pas le concept de « marcher » et qui ne sait pas qu’il ne marche pas. Je ne sais pas que je ne sais pas, je suis inconsciemment incompétent.

Le deuxième est celui où l’on commence en se rendant bien compte qu’on ne sait pas faire, mais on sait de quoi on parle et donc on peut avoir envie d’essayer et d’apprendre. Je sais que je ne sais pas, je suis consciemment incompétent.

Le troisième est le stade de la répétition et de la concentration. J’ai appris à faire et donc je conscientise mon action pour faire ce que j’ai appris afin que ca fonctionne. Je sais que je sais, je suis consciemment compétent.

Le dernier stade est celui de l’évidence, de l’habitude, si profondément ancrée que je n’ai même pas à y réfléchir. Je ne sais même plus que je sais. Je suis inconsciemment compétent. Il faut me remémorer volontairement certains souvenirs, ou observer des apprentissages autour de moi pour m’apercevoir que moi aussi j’ai appris un jour.

Il existe justement un autre stade ultime qui est celui de la transmission. Maintenant que je suis inconsciemment compétent, je vais mettre mon expérience, ma connaissance, à la portée d’autres personnes pour leur apprendre ce qui est maintenant évident pour moi. Pour ce faire, je dois à nouveau prendre conscience que je sais pour faire passer correctement le message. Je deviens à nouveau consciemment compétent, en sachant qu’en même temps je suis inconsciemment compétent….

Bref, cette petite explication pour bien exposer l’évolution de l’apprentissage, et mettre l’accent sur le deuxième stade, celui vraiment de l’expérience, heureuse ou malheureuse, où il se joue beaucoup de choses, en fin de compte. Si je tombe régulièrement, que je m’égratigne et que j’ai mal, qu’on rit de moi, cela ne va pas m’inciter à y retourner. Qu’est ce qui au fond est mon véritable moteur ? Voir que les autres le font facilement et de manière fluide ? alors je les prends pour modèle et j’ai envie de faire comme eux ? Qu’est ce qui me pousse à continuer cet apprentissage même si ce n’est pas drôle à chaque fois ? Voir que chacun est différent, qu’on ne réussit pas du premier coup, qu’il faut persévérer car d’aucuns auront besoin d’un peu plus de temps, d’autres d’un peu moins ? Et qu’est ce qui me MOTIVE à poursuivre ?

Quand ça ne fonctionne pas, on peut dire « stop », je suis tombé donc le vélo n’est pas pour moi. Cependant, arrêter un apprentissage, c’est prendre le risque de se priver de sa richesse, d’une nouvelle capacité ou d’une nouvelle connaissance. Boileau l’a très bien résumé : « cent fois sur le métier remettez votre ouvrage ». On ne devient bon qu’en essayant à nouveau, jusqu’à devenir inconsciemment compétent. Recommencer, encore et encore, de manière légèrement différente, afin d’augmenter le spectre de l’expérience, le champ d’apprentissage autour de cette nouvelle technique. Je suis tombé de vélo et égratigné le genoux droit ? Je vais essayer de réajuster ma posture sur la gauche… La selle trop haute m’a fait chuter ? Il est préférable de la baisser… Cette selle trop basse me donne mal au dos ? Il est utile de la rehausser un peu… Ce vélo est rouge ? Et si j’essayais avec un bleu ? Je ne me sens pas encore à l’aise ? Et si je remettais les deux petites roues ? Ah, mais on va se moquer de moi ? Et alors, qu’est ce que je veux ? Faire du vélo et qu’on apprécie ma détermination, même si je sens que je suis encore maladroit ? ou ne jamais savoir en faire et mal l’accepter car j’aurais échoué vis à vis de moi-même, en restant consciemment incompétent sans plus essayer de dépasser cette appréhension ?

La question de l’utilité d’un nouvel apprentissage peut se poser parfois. Est-ce que j’en ai vraiment besoin ? Qu’est ce que ça va m’apporter de plus ? Cette dernière question est primordiale, et souvent utilisée en PNL. Elle vient souligner la MOTIVATION. En quoi cela va me permettre de faire des choses que je ne faisais pas auparavant et qui sont importantes pour moi ? C’est le coeur de la volonté d’apprentissage et de changement. Ce changement qui a lieu dans un contexte où on ne se sent pas en adéquation avec ce que l’on projette de nous même. On ressent le besoin de faire un ajustement, d’expérimenter et d’apprendre autre chose. Sinon, pourquoi nous sentirions nous « mal » ? On assumerait simplement notre vie, nos habitudes actuelles, et la question ne se poserait pas… aucune question d’ailleurs, prisonnier de notre zone de confort, rassurante et tellement sécurisante. Cependant parfois, on est sollicité par l’extérieur, un proche, un ami, un parent, ou un collègue, une relation, qui nous instille une petite question dans le crâne « et si tu faisais plutôt ça ?… tu ne sais pas ? Il faut apprendre alors, c’est tellement bien/cool/pratique/évident/utile/génial… ». Parfois on peut ressentir le besoin de faire comme tout le monde. Mais à quoi correspond vraiment ce besoin de faire comme tout le monde ? Est-ce vraiment quelque chose qui va m’apporter un plus dont je ressens l’importance ?

L’être humain est un animal social, pour reprendre Rousseau. Faire « comme les autres » apporte souvent une marque de reconnaissance et un signe d’appartenance, il s’agit d’entrer en résonance. Nous avons besoin de ces appartenances/résonances afin de nous identifier à un ou plusieurs groupes, comme celui des amateurs de vin, ou celui des randonneurs, ou celui des informaticiens, ou celui des thérapeutes, ou celui des barbus, des blonds, des chauves, des tatoués, des yeux bleus, des germanophiles, etc. Ces appartenances nous permettent de trouver un cadre au sein duquel nous essayons de nous définir plus intimement. Alors refuser un apprentissage qui nous éloignerait d’un groupe auquel nous souhaitons appartenir n’est pas toujours facile, il faut bien le reconnaître. A moins que la difficulté ne réside surtout dans l’acceptation de notre souhait à intégrer ce groupe, c’est à dire accepter d’endosser une étiquette, voire la revendiquer, même si ce n’est pas toujours simple.

Alors, au final, qu’est ce qui me motive ? Pourquoi j’ai envie d’expérimenter, d’apprendre ? Pour me rapprocher de mes semblables ou ce que j’en crois ? pour m’apporter une nouvelle compétence qui me sera utile ? Ou encore pour avoir le plaisir de savoir (faire) et développer mon estime de soi ? Chacun trouvera sa réponse, aucune n’étant exclusive et ces propositions n’étant pas exhaustives. L’essentiel n’est-il pas d’être en accord avec soi-même lors de nos apprentissages, nos ressentis, nos convictions, nos décisions et nos actions ? Ceci fera peut être l’objet d’un nouvel article sur la « congruence »…